dimanche, janvier 15

Les albums de 2005 (III)

Juliet - Random Order (Virgin)
Pour beaucoup, le nouvel album de Madonna a fait de Stuart Price le producteur emblématique de 2005 mais il serait injuste de ne pas également mentionner à son crédit l'album de Juliet, sorti au début de l'année et auquel la presse prédisait un succès commercial qui n'est jamais venu. On y retrouve pourtant beaucoup de ce qui fait le prix de Confessions On A Dancefloor. Avec néanmoins une légère différence : tandis que Madonna se place dans une optique de pop pure, arrondissant les angles et polissant ses chansons pour en maximiser l'audience, Juliet a une vision un peu plus alternative (j'aurais presque envie de dire punk) de ce à quoi ses chansons électro-pop doivent ressembler. En conséquence, sa manière de chanter est plus brute et évoquerait plutôt Courtney Love et Justine Frischmann que Madonna (voir New Shoes ou Puppet par exemple). Par ailleurs, les compositions sont ici plus ouvertement minimalistes. Le single Avalon est ainsi essentiellement composé de deux phrases répétées en alternance sur une rythmique continue et le fait que Stuart Price parvienne à créer une (excellente) chanson de sept minutes à partir de ces seules phrases me semble être une sorte d'exploit. L'album demande donc sans doute quelques écoutes pour se révéler complètement, ce qui explique peut-être que le grand public, pourtant manifestement réceptif au son de Stuart Price, soit passé à côté.

Paula Frazer - Leave the sad things behind (Birdman)
Mon goût pour la pop me rend très sensible aux mélodies. J'accorde donc une grande importance aux voix qui les portent, à leur timbre ou à leur pouvoir d'évocation. Il existe ainsi une poignée de voix auxquelles je voue un culte aveugle et dont la simple écoute me ravit, au point que la qualité des chansons qu'elles servent passeraient presque au second plan. Depuis ma découverte du premier album de Tarnation, la voix de Paula Frazer en fait partie (aux côtés de celle de Scott Walker par exemple). En conséquence, même si les chansons de ce deuxième album solo avaient été tout à fait quelconques, je leur aurais sans doute trouvé des qualités. Heureusement, elles ne le sont pas et une bonne moitié d'entre elles rappellent d'ailleurs les meilleurs morceaux de Tarnation (les vocalises au début de Watercolor Lines sont à la limite de l'auto-citation), mais du Tarnation apaisé, où la guitare électrique s'effacerait au profit d'instruments acoustiques. Le piano par exemple est utilisé à la perfection dans l'introduction de Long Ago, qui est sans doute ma chanson préférée de l'album. Je me souviens que, à l'époque de sa sortie, le premier album solo de Paula Frazer m'avait un peu déçu. En écoutant celui-ci, je me demande si je ne ferais pas bien de le réévaluer.

Rammstein - Rosenrot (Universal)
Tout un pan du metal moderne ne me semble compréhensible que si on accepte de prendre en compte sa composante parodique. Cradle of Filth, par exemple, est essentiellement un groupe de clowns oeuvrant dans le domaine du grand guignol. Dans un genre un peu différent (mais pas tant que ça), Rammstein déroule, avec les apparences du plus grand sérieux, une forme de metal industriel jusqu'au-boutiste que leur nationalité rend plus effrayant qu'il n'est en réalité (leurs prétendues sympathies nazies inquiètent de nombreux parents). J'avais beaucoup aimé leur précédent album (Reise Reise) parce que l'on y trouvait, derrière cette façade métallique, des chansons pop rigoureusement irrésistibles (difficile d'imaginer morceau plus immédiatement jouissif que Amerika). Malheureusement, Rosenrot me semble moins réussi. La façade métallique y est plus clinquante que jamais mais les chansons qu'elle dissimule sont dans l'ensemble moins intéressantes. Le duo avec Sharleen Spiteri de Texas, par exemple, est complètement loupé, de même que Te Quiero Puta, qui tente contre toute raison de marier heavy-metal germanique et musique mexicaine. Cela dit, Benzin et Spring déménagent bien comme il faut, et je défie quiconque de ne pas sourire en écoutant Ein Lied, improbable ballade où Till Lindemann susurre son texte sur un accompagnement de scie musicale.

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